Serge Paquet
Une réussite toute en équilibre
ParIsabelle Boin-Serveau
Parfois, Serge Paquet s’interroge sur ce qu’aurait pu être son existence s’il n’avait pas été accepté en optométrie. Il n’a malheureusement pas de réponse, mais cela ne l’empêche pas de se considérer comme très chanceux d’exercer une profession qu’il aime et « d’être à mon compte depuis pratiquement le tout début de ma carrière ». C’est vrai qu’en tant qu’entrepreneur, il faut souvent travailler davantage. Mais, il est aussi vrai que l’on se sent plus libre. « Et cette liberté-là, cela vaut de l’or! », s’exclame-t-il.
Serge Paquet, qui a grandi à Neufchâtel (ville de Québec), n’a pas suivi les traces de son père fonctionnaire, mais a bien compris l’importance de la valeur que représente le travail. Nul besoin de ressentir l’appel divin, pour construire les voies de son destin… Le jeune homme a plutôt été influencé par l’optométriste Léonard Noël, gendre d’un couple d’amis de la famille. « J’étais attiré par le côté mystérieux de la salle d’examen. Je suis allé le voir et il m’a tout montré. J’ai immédiatement aimé ça! » explique celui qui a été également séduit par les avantages de la profession libérale.
« Réussir ma vie »
À propos de ses rêves d’enfant, Serge Paquet confesse qu’il a tout simplement désiré réussir sa vie, autant sur le plan professionnel que familial, la famille gravitant au sommet de ses priorités. Au cégep, l’étudiant en sciences de la santé fait sa demande d’admission en optométrie. Refusé une première fois par l’École d’optométrie de Montréal, il ne baisse pas les bras et s’inscrit durant une année de transition en activités physiques avant de retenter sa chance : « Ce n’était pas une année perdue puisqu’on avait l’occasion de suivre des cours d’anatomie qui étaient d’ailleurs crédités, peu importe ce que l’on faisait après. » C’est durant la session d’hiver de son année de «transition» que Serge Paquet fait la connaissance des pentes enneigées de Whistler en Colombie-Britannique. L’année suivante, en 1992, l’École d’optométrie lui ouvre enfin ses portes mettant fin à ses incertitudes : « J’ai vécu là-bas quatre formidables années au milieu d’étudiants dont certains sont encore des amis que je fréquente régulièrement… Je suis quelqu’un qui entretient ses amitiés », ajoute celui qui rencontre avec une infaillible constance ses amis du secondaire.
Tout est clair dans l’esprit de Serge Paquet : à la fin de ses études en optométrie, il va s’établir à Québec, sa ville natale. En 1996, il travaille d’abord dans le bureau indépendant de Nathalie Picard à Charlesbourg : « J’étais à temps partiel, car il faut se rappeler que ces années-là n’étaient pas très fastes dans notre domaine. Je suis donc allé compléter mon horaire chez Sears à Lévis avec le Dr René Marchand. »
Les premières armes en affaires
C’est un représentant qui informera le jeune optométriste de l’intention de Walmart d’ouvrir des centres d’optique dans ses magasins. « J’ai tout d’abord pensé que c’était de la folie et qu’aucun professionnel ne voudrait travailler là. », convient-t-il. Néanmoins, la graine entrepreneuriale qui avait déjà germé dans son esprit balaiera ses ultimes réticences.
C’est ainsi qu’en 1997, à 26 ans, Serge Paquet fait l’achat de la concession Walmart des Galeries de la Capitale. Pour le conforter dans son choix, la rumeur (décidemment récurrente!) de l’époque répand l’idée que « le marché de l’optique est fini pour les indépendants et que les chaînes vont envahir le domaine à la grandeur du continent ».
La même année, le jeune optométriste rempli d’espoir et débordant d’énergie cumule les bonheurs en unissant sa destinée à celle d’une jeune ergothérapeute : «1997 a été une année fantastique! Je crois que pour devenir un entrepreneur, le meilleur moment pour se lancer est celui où l’on n’a pas encore d’enfants, pas de maison… autrement dit, celui où l’on a rien à perdre. Pour moi, tout a très bien fonctionné. J’ai pu rembourser l’argent prêté par mon père six mois plus tard!»
Des paris gagnés
Serge Paquet n’a jamais senti de regard réprobateur de la part de ses confrères par rapport à son exercice au sein d’une grande surface, et sans doute a-t-il coupé court à la controverse en répétant qu’il faisait « chez Walmart ce que le Dr René Marchand fait chez Sears! » De fait, son bureau, Optique de la Capitale, fonctionne très bien. En 2002, Walmart décide de quitter les Galeries de la Capitale pour s’établir dans le quartier en pleine expansion du boulevard Lebourgneuf. Serge Paquet réalise alors que son destin est « trop » dépendant de ce géant du commerce de détail. Pourtant, il signe à nouveau un bail de cinq ans, mais ouvre en parallèle la Clinique visuelle de l’Hêtrière à Cap-Rouge, à l’ouest de la ville de Québec. Son objectif? Conquérir une absolue liberté décisionnelle.
En 2007, Serge Paquet ne renouvelle pas son bail avec Walmart et établit son bureau un peu plus loin sur le boulevard Lebourgneuf : « Je ne pouvais pas m’agrandir dans cette structure… il fallait donc que je prenne le risque de m’installer ailleurs. » Un mouvement qui s’inscrit logiquement dans sa nécessité de demeurer maître de son destin. Encore une fois, son intuition va donner raison au jeune entrepreneur qui défiera les plus sombres pronostics comptables en augmentant son chiffre d’affaires la même année du déménagement. Cette année, le bureau de l’Hêtrière a été transféré sur la route Gauvin, dans un tout nouveau centre commercial à l’architecture design. Résultat : un autre pari gagné!
Serge Paquet évoque les besoins des baby-boomers pour expliquer la très bonne tenue des affaires dans ses deux bureaux, mais il croit surtout que c’est la qualité de son personnel et des professionnels, fidèles au poste depuis plus d’une décade, qui donne confiance à la clientèle : « Les gens sont plus constants qu’on ne pense. J’en ai eu la preuve avec la clientèle de Walmart qui m’a largement suivi. » En outre, les six jours d’examen, les trois soirs d’ouverture par semaine, le laboratoire et la disponibilité pour les urgences sont loin d’être étrangers au succès d’Optique de la Capitale.
Se détacher pour mieux revenir
Comme beaucoup d’entrepreneurs passionnés par leurs « bébés d’affaires », Serge Paquet a cru que la roue ne pouvait pas tourner sans lui. Cependant, en 2011, il a pris un nouveau risque en emmenant son épouse et ses deux filles, âgées de 12 et 9 ans, vivre l’aventure dans l’Ouest canadien. « Le but initial était de mettre nos enfants en immersion en langue anglaise durant une année », mentionne-t-il. Cependant, quelques mois avant de partir, il comprend qu’il ne pourra pas supporter une aussi longue séparation avec ses affaires. La famille optera pour un compromis de quatre mois qui aura le mérite de leur donner assez de temps pour expérimenter pleinement le mode de vie en Colombie-Britannique.
De retour de cette aventure, outre les bienfaits pour ses enfants, Serge Paquet retient le bénéfice d’avoir pu ralentir son rythme de vie. Il concède toutefois avoir travaillé trois jours par semaine et avoir gardé, à distance, un œil sur ses bureaux. « J’ai adoré tout ce temps libre que nous avions et toutes les activités de loisir que nous pouvions faire ensemble : vélo de montagne, golf, tennis, ski… Mais j’ai aussi réalisé que je ne suis pas fait pour ce style de vie à long terme. » Néanmoins, il a appris que son absence (pour une courte durée!) ne saurait mettre en péril ses affaires : « Tout cela est dû à mon équipe qui fait un travail extraordinaire. »
Une équipe qui va s’agrandir avec l’ouverture, prévue en mai, d’un troisième bureau. Parce que Serge Paquet est l’incarnation parfaite de la race des entrepreneurs, de celle qui veut croire que bâtir pour l’avenir, avoir une vision à long terme, c’est créer une richesse dans notre société. Et cette race n’a pas de raison de s’éteindre!